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Agro ecologie

  • Liste des sept facteurs à l’origine de notre projet en « Val-de-Mont », Meurville, Côte des Bar, Champagne et présentation de nos parcelles.

    La maison Perron Beauvineau cultive ses vignes sur les finages de Meurville et de Couvignon. Certaines parcelles sont travaillées, en pleine propriété, depuis cinq générations. D’autres ont été achetées et remodelées par Marilyne et Jean-Claude Perron au cours des années 1980. Le travail minutieux sur ces parcelles dans les années 1990 et 2000 a permis notamment l’arrivée de nouvelles cuvées (Minor Villa lors de la grande année 1996, les cuvées Pure en 2005). Cette démarche s’est poursuivie dans les années 2010 par Fabrice (devenu exploitant en 2010), rejoint par son épouse Marie-Gabrielle (en 2013).

    Attentifs tous deux à l’évolution du vignoble de la maison, Marie-Gabrielle et Fabrice Perron font alors, à la fin 2017, l’acquisition de six parcelles de vignes (pour une surface de 25 ares 21) et terres A.O.C. Champagne (surface de 15 ares 39) en le lieu-dit « Val-de-Mont », à Meurville. Pourquoi cette acquisition ? Retour sur les sept facteurs qui ont déclenché ce projet.  

    1. D’abord, c’est l’occasion de mener un nouveau projet commun: notre premier achat de vignes en couple. Notre objectif est de mener le travail sur ces parcelles, tous les deux, avec au fur-et-à-mesure de leur maturité, l’aide des enfants. Ce projet peut se décomposer en trois phases : la première phase, immédiate, avec le travail et l’exploitation des parcelles de vignes déjà plantées, en favorisant la biodiversité. Dès 2018, nous avons commencé, par exemple, à apporter uniquement des amendements biologiques. La deuxième phase aura lieu, ensuite, avec la préparation et plantation d’une nouvelle vigne sur une partie de la surface restante en terre A.O.C. . Et la troisième phase sera à déguster…  

      

     (La 3e saison de taille en mars 2020, effectuée systématiquement « à l’ancienne » et non mécanisée. Tout ce travail sous la surveillance d’Onyxia, jeune golden retriever. Crédit photos F.P. et M.-G.P.)

     (Vendanges ensoleillés à « Val-de-Mont », septembre 2019. Crédit photo : F.P.)

     

    2. « Val-de-Mont » est un des lieux-dits les plus réputés de la « vallée du Landion ». En 1868, par exemple, les vignes vendues à « Val-de-Mont » dépassent les 2000 francs/hectare, cotation (et réputation) supérieure, par exemple, aux lieux-dits « Pillonvaux » (Meurville), « Narvaux » (Urville) et « Cendrée » (Urville) ou plus largement encore à ceux de « Bernardin » (Bligny) et « Val Ermite » (Champignol). Pour en savoir plus, voir Fabrice Perron, "Les mouvements fonciers et immobiliers en Champagne méridionale L’exemple de la vallée du Landion d’après de nouvelles archives inédites de maîtres Louis-Adolphe Salmon et Pierre Ferdinand Élisé Cligny, notaires successifs à Bligny, 1866-1877", in Annales de la Société Historique de Bar-sur-Aube et du Pays Baralbin, n°4, 2021, p. 51-76 . 

    Suite à la crise du phylloxera à la fin du XIXe siècle, l’emprise viticole à « Val-de-Mont » se réduit, friches, savarts et bois progressent et se substituent alors à des parcelles viticoles. Vint alors l’ère de la deuxième reconstitution du vignoble champenois, à partir des années 1950 et progressivement les vignes reprennent leur place antérieure avec des propriétés extrêmement morcelées. Comme l’évoquait le géographe Roger Dion, « les vignobles sont des créations de l’homme plus encore que des expressions du milieu naturel ». 

    Cherchant à favoriser les conditions d’exploitation agricole, en regroupant des parcelles, les 33 propriétaires viticoles de ce lieu-dit établirent ensemble à la fin 1987 un « échange multilatéral », acte notarié assez peu pratiqué avec ce nombre si élevé de propriétaires. Nos futures parcelles changèrent ainsi de main, tout en restant dans celles de familles vigneronnes de Meurville.   

    3. La situation géographique de ces parcelles en « Val-de-Mont » : à proximité de notre exploitation.

    Situées à plus de 100 mètres des habitations, ces parcelles permettent de s’y rendre à pied en une petite dizaine de minutes. C’est donc intéressant à la fois pour notre santé et pour l’impact carbone. Cette proximité rend possible également des balades dans les vignes avec des clients et amis, qui n’auraient pas beaucoup de temps. D’autres balades sont possibles vers des vignes un peu plus éloignées si les disponibilités horaires sont plus grandes.   

      

      « Val-de-Mont », mars 2020 (Crédit photo M.-G.P.)

    4. Ces parcelles ont bénéficié au préalable d’un bon entretien : 6% de pieds morts seulement lors de l’acquisition, ce qui est un bon taux pour une vigne replantée en 1990. 

     

    (Photo de « Val-de-Mont » en 1990 prise pour observer notre regrettée double poney, « Babiole ». Or, nous pouvons y apercevoir, en haut à gauche, la vigne nouvelle replantée en 1990, par le précédent propriétaire.  Crédit photo M.P.) 

    L’encépagement est en pinot noir mais nous avons pu noter lors de notre arrivée quelques plants isolés de chardonnay, exclusivement dans le 1/3e bas des parcelles. Selon les propos du précédent propriétaire, il a choisi de complanter en chardonnay, pour augmenter les chances de résister aux gelées printanières. Nos observations depuis deux ans et demi sur ce « minuscule » échantillon laissent à penser que ce cépage se trouve bien à « Val-de-Mont ». Nous suivrons cette piste pour notre prochaine période de complantation (date prévue : printemps 2021).  

    5. L’orientation et l’inclinaison des parcelles est également importante pour une bonne pratique viticole. Elles bénéficient ici d’une orientation Sud Est. Situées à une altitude de 218 mètres en bas, elles atteignent 235 mètres en haut de parcelles, soit un dénivelé de 17 mètres. La pente moyenne est de 26 % avec un maximum à 48%.  Elles sont bordées de vignes sur deux côtés. Sur le plan géologique, le sous-sol date de l’ère jurassique supérieur, associant à la fois dépôts marneux et calcaires. 

     

    (Les bourgeons poussent, 6 mai 2019. De l’herbe naturellement aussi, un bon signe... Crédit photo : F.P.)

    6. Cet achat a pu s’effectuer dans le cadre des préemptions de la S.A.F.E.R., organisme ayant pour objectif de favoriser les installations des jeunes vignerons et agriculteurs, ce qui revient à « sauvegarder » le monde du vignoble, et ainsi à encourager une certaine diversité des producteurs et donc, en fin de chaîne, des champagnes servis aux consommateurs. Dans ce cas présent, ces parcelles de vignes devaient être rachetées par un négociant marnais, déjà propriétaire d’un peu plus de 100 hectares de vignes en Champagne. La section locale du Syndicat général des vignerons de Meurville a alors alerté en début d’année 2017 la S.A.F.E.R. Champage-Ardennes de cette probable transaction, l’informant que six vignerons locaux étaient prêts à se porter candidats. Notre premier projet d’achat (et donc première candidature par l’intermédiaire de ce système de la S.A.F.E.R.) s’est réalisé. Merci à la S.A.F.E.R pour leur confiance ! 

    7. Enfin, il se trouve que des ancêtres de Fabrice travaillaient déjà dans des parcelles de vignes en « Val-de-Mont » au XIXe siècle ou au début XXe siècle. C’est le cas par exemple de plusieurs membres de la famille Petillot. Parfois ces derniers rencontraient quelques déconvenues dans leur travail. Ainsi, le 16 février 1906, l’un des membres Petillot taillait en « Val-de-Mont » dans une plantation de deux ans (effectuée donc en 1904, lors de cette phase de reconstitution du vignoble après le phylloxéra) quand il s’aperçut « que plusieurs plants étaient coupés entre deux terres ». L’auteur de ces méfaits est resté inconnu : de quoi être énervé… mais pas encore révolté (cinq ans avant 1911) !